Les Temps qui restent (TQR) est un collectif multimédia déployé autour d’une revue généraliste en ligne, lancé à l’initiative du dernier comité de rédaction des Temps Modernes (interrompu en 2018). Outre la revue, il organise aussi des événements publics, des publications papier et rédige un rapport annuel sur les temps qui restent. Il souhaite contribuer à reconstituer une capacité d’action collective, par-delà l’épuisement des modèles de l’engagement et des imaginaires du futur hérités des temps modernes, discrédités par leur incapacité à se rendre sensibles à leurs impacts planétaires dévastateurs.

Les Temps qui restent a été constitué en 2024 à l’initiative de l’ancien comité de rédaction de la revue Les Temps Modernes, sous l’impulsion de Patrice Maniglier et Juliette Simont, après la décision prise par Gallimard, propriétaire du titre, d’y mettre un terme. Il repose sur la conviction que le projet inaugural de la revue fondée par Sartre, loin d’être périmé par la situation présente, y est au contraire devenu d’autant plus pertinent – à condition d’être profondément transformé.

Il s’agissait, pour la revue historique, de prendre acte, après la Deuxième Guerre Mondiale, de l’impossibilité de s’isoler du contexte global dans quelque tour d’ivoire que ce soit et de la nécessité d’y voir plus clair sur nos manières collectives et individuelles d’être prises dans un mouvement de totalisation qui les dépassait, mais aussi les compromettait. Aujourd’hui, dans le contexte des bouleversements des systèmes biogéochimiques à l’échelle planétaire sous l’effet d’activités humaines, et précisément d’activités qui se voulaient de « modernisation », ce diagnostic et cette exigence s’avèrent d’autant plus pertinents. Les Temps qui restent se propose d’être ce lieu où la notion sartrienne d’engagement se redéfinit à l’âge de « l’Anthropocène », c’est-à-dire dans le contexte de la planétarisation de nos modes d’existence, à la fois en continuité et en rupture avec l’histoire des Temps Modernes.

La revue Les Temps qui restent mélange des périodicités différentes : elle est constituée de numéros trimestriels, mais les contributions sont mises en ligne en flux continu, et certaines sont des séries et des chroniques régulières ayant leur propre périodicité.

La revue publie des contributions dans tous les mediums imaginables (textes, images, sons, vidéos, évènements même) qui nous aident à y voir plus clair au sujet de la tâche la plus urgente de notre présent, qu’on peut qualifier dans les mots de Bruno Latour : comment faire revenir la Modernité sur Terre ?

Le titre de la revue peut s’entendre en quatre sens, qui dessinent l’espace problématique de la revue.

  • Hériter des Temps Modernes : Les Temps qui restent, c’est d’abord ce qui reste de la revue Les Temps Modernes. Les Temps qui restent se revendique du geste fondateur des Temps Modernes sur deux points en particulier : articuler les vies et les expériences individuelles à une perspective globale ou totalisante ; le faire sans ligne dogmatique a priori, dans un esprit synthétique ou diagonal.

  • Agir tant qu’il est encore temps : Les Temps qui restent, c’est aussi le temps qui nous reste avant qu’il ne soit trop tard. Trop tard pour quoi ? Pour faire « revenir sur Terre » les trajectoires sociotechniques dominantes, c’est-à-dire les modifier de sorte qu’elles n’altèrent pas les dynamiques du système planétaire avec des conséquences potentiellement apocalyptiques sur ces systèmes sociotechniques eux-mêmes et la vie terrestre.

  • Apprendre à vivre dans les restes de la Modernité : On ne se débarrasse pas de la Modernité comme la Modernité a cru se débarrasser de la tradition. Les gaz à effet de serre, les déchets radioactifs, les microplastiques, mais aussi les infrastructures matérielles et mentales que la Modernité a mises en place, ont la temporalité d’un reste avec lequel il va falloir vivre longtemps. La revue Les Temps qui restent explorera la manière dont nous pouvons vivre avec le reste de la Modernité pour mieux la désactiver.

  • Ouvrir à d’autres temps : Les Temps qui restent, ce sont enfin les autres temps qui restent dans les coffres de l’avenir, ces histoires virtuelles parallèles à la nôtre et que notre trajectoire actuelle oblitère. Les Temps qui restent a pour vocation de libérer ces temps alternatifs, ces temps qui restent encore, et qui restent même à imaginer.

Une des originalités les plus significatives des TQR est son mode de gouvernance : dépourvue de comité de rédaction, elle est gérée par une communauté très large répartie en trois cercles (le Comité, le Conseil et le Collectif), soucieuse d’éviter autant que possible les effets pervers des mécanismes de pouvoir et d’encourager le plus grand engagement possible de chacune et de chacun dans l’action. Un Comité scientifique veille à la qualité des contenus à caractère scientifique publiés dans la revue.

Il veut susciter la réflexion sur l’héritage de la Modernité, tenter un inventaire nuancé de la démodernisation et accueillir toutes les initiatives susceptibles de contribuer à faire atterrir les dynamiques historiques actuellement dominantes. Il espère contribuer à l’émergence un sujet collectif et pluriel capable de faire quelque chose des temps qui restent.

Pour un développement approfondi des intentions de la revue, on peut lire le texte programmatique de Patrice Maniglier « Des Temps Modernes aux Temps qui restent : histoire et avenir d’une revue, histoire et avenir du monde » disponible sur le site en plusieurs langues.